En l’an 2000, alors qu’un coup d’état secoue sa Côte d’Ivoire natale, Kassim Doubia arrive au Nouveau-Brunswick, pour étudier à l’Université de Moncton. C’est une décision mûrement réfléchie qui ne laisse envisager aucun retour à la maison, « je venais avec l’idée de construire quelque chose au Canada, » précise-t-il.
L’année précédente, à la télévision, il avait découvert la ville de Moncton alors que s’y tenait le grand Sommet de la Francophonie. Tout ce qu’il avait vu sur les images lui avait plu : une province bilingue, une institution universitaire de taille modeste, dans laquelle il pourrait étudier en français tout en apprenant l’anglais.
Il n’avait pas envisagé, par contre, la température! Arrivé en janvier, avec des vêtements tout à fait inadaptés au froid et à la neige, les choses n’ont pas été faciles. D’autant plus qu’il ne savait même pas comme faire fonctionner le chauffage dans sa chambre universitaire. Aujourd’hui il en rit et ajoute « on s’y fait, à la longue. »
Durant ses 6 années d’études, Kassim obtient d’abord un bac en informatique puis une maîtrise en administration des affaires, mais il s’implique aussi très tôt dans sa communauté à l’université-même puis au sein d’organisations comme la Société Nationale de l’Acadie.
« L’Acadie est plurielle. Je me sens Acadien de cœur. Je partage les mêmes défis que tout le monde. Il faut faire avancer l’Acadie et pour que nos défis de nouveaux arrivants soient mieux compris, il faut qu’on participe à construire la communauté d’accueil. »
En 2006, Kassim Doubia, trouve un emploi à Pacquetville dans la Péninsule Acadienne et en 2007 il se fixe à Tracadie. Il retrouve sur place une amie de l’université, elle-même originaire de la région, et ils se marient. Deux filles, d’aujourd’hui 14 et 12 ans, viennent agrandir la famille. Tout en bâtissant cette nouvelle vie, Kassim garde des liens étroits avec sa famille en Côte d’Ivoire. Il fait même venir un de ses frères pour étudier lui aussi. Ce dernier est en train de finir des études de médecine au Québec.
Tout va pour le mieux mais Kassim Doubia demeure animé du désir de « faire une différence directe », comme il le dit lui-même et de « redonner à la communauté. » Encouragé par beaucoup de gens, il se présente à la mairie de la ville de Shippagan et l’emporte. Réélu pour un second mandat, Monsieur le Maire, on le sent bien en lui parlant, est fier de son travail et des évolutions de sa ville.
Quand on lui demande s’il a quelques conseils à celles et ceux qui souhaitent eux aussi venir ici, il n’hésite pas :
- Venir sans idées préconçues et prêt à s’adapter aux habitudes des gens.
- Ne pas attendre qu’on vienne vers vous et ne pas avoir peur d’aller vers l’autre, ça ouvre bien des portes.
- Trouver un organisme qui correspond à vos valeurs et vous impliquer, pour briser l’isolement et créer des liens.
Ce n’est pas toujours facile, explique-t-il avec honnêteté, il y a des moments de découragements, mais il faut comprendre que ça prend du temps pour vraiment s’installer et prendre racines. Comme Kassim Doubia l’a prouvé et le répète « l’investissement personnel est essentiel pour s’intégrer. »